Les groupies et les fans sont de sorties. Non je ne vous mens pas. Vous devez vous demander pourquoi toutes ces filles crient devant une pancarte collée sur le mur. Je vous répondrais que c’est simple … leur groupe de musique préféré est en ville. Nous sommes à Tokyo tout de même, une si grande ville sans concert, ce serait bizarre non ?

Et puis ça rassemble la population pour se divertir. Je ne connais pas le nom du groupe qui va faire sa représentation dans jolie ville. Et pour vous dire la vérité je ne m’en fais pas plus que ça. Les concerts ne sont pas ce que j’affectionne le plus, non pas que je les déteste mais je n’en raffole pas. Bref, l’information de l’affiche ne m’intéresse pas du tout.

J’arrive le lendemain à l’école et comme on pouvait l’espérer, tout le monde parle déjà de ce concert.
On peut entendre des « Non mais tu te rends compte ? Ils viennent faire un show entier à TOKYOOOOOOOO » ou même « Faut qu’on se dépêche d’acheter des places, c’est LE concert de notre vie. »
Mais … trop de groupies tuent les groupies. Je suppose quand même que le groupe en question est énormément connu. Comment je peux le dire ? Regardez seulement les réactions de ces magnifiques hystériques. Elles hurlent et chantent des chansons. A la limite si elles chantaient bien, ça passerait mais non. Une groupie sans fausses notes ne serait pas une bonne groupie. Elles doivent à coup sûr avoir une charte, un code, quelque chose dans ce style pour leur dicter ce qu’elles doivent faire.

Je vous promets toute cette excitation pour un concert … ça m’exaspère.
Ma journée est rythmée par les cris de ces filles, je n’attends qu’une seule chose, la fin des cours. Elles m’ont passé l’envie de rester ici. J’ai horreur de ce genre de pestes. Je sais qu’elles ne sont pas toutes comme ça mais avouez que parfois c’est abusé. Ou alors je suis la seule à le penser. Mais enfin bref.

Une fois ma journée finie, je me dirige vers ma chambre au pensionnat. Je monte au premier étage et je me jette littéralement sur le lit qui m’est attribué. Je peux enfin reposer mes pauvres oreilles. Juste au moment où je ferme les yeux, j’entends la sonnerie et le vibreur de mon téléphone.
Un peu réticente à prendre mon téléphone, j’attends quelques secondes et tends ensuite mon bras. Pour enfin me résigner à laisser tomber. Je commence à somnoler quand un autre message me parvient. Je soupire pour montrer que je n’ai absolument pas envie de répondre. Mais un autre message arrive. J’ouvre mes yeux et me mets en position assise.

Je me demande quand même qui peut tant insister pour me parler. Je prends la cause de mon réveil et regarde les e-mails que j’ai reçus.

Le premier indique : « EH SAICHIKO ! Il faut absolument que tu te joignes à moi pour le concert, j’ai déjà deux places. Et je t’assure qu’en ce moment elles sont comptées. Je t’entends déjà râler mais je vais te donner un argument qui va te convaincre directement. C’est un CONCERT EXCEPTIONNEL, tu n’en verras jamais deux comme celui-ci ! »

Tant d’enthousiasme pour un simple concert, je trouve ça poussé. Mais bon, mon amie d’enfance a toujours été comme ça, même si je ne m’intéresse pas à cette représentation soit disant exceptionnelle, je tiens à la revoir. Ca fait tellement longtemps qu’on s’est promis d’organiser une sortie à deux. Il est vrai que c’est une bonne occasion.

Le second message indique : « Eh Sai’ pourquoi tu ne réponds pas ? »

Je ne voulais pas répondre quand j’ai reçu ses messages. Mais bon elle est tellement insistante qu’à la fin, je finis toujours par répondre.

Quant au troisième e-mail il dit : « Réponds :( »

Tout en ayant le sourire aux lèvres j’appuie sur la touche et commence à rédiger un message, je lui dis que je serais ravie de passer du temps avec elle mais qu’il faudrait qu’elle m’apporte des boules quies pour que je n’entende pas les groupies hurler.

Il faut admettre que ces filles nous font manquer les musiques.
Mais bon, le concert a lieu demain. Je suis donc partie me coucher pour être en forme. Encore une chance que nous sommes vendredi soir.



©Didi Farl pour Never-Utopia

Je me suis préparée pour sortir. Je ne suis pas emballée mais j’ai vraiment envie de revoir mon amie d’enfance et qu’on passe un moment entre fille.
Je reçois un texto, encore un. Il faut dire que mon amie est une fan des e-mails et des sms.

« Alors t’es prête pour le concert ? :D Je suis trop emballée ! Je viens te chercher dans 10 minutes, sois patiente. XOXO La meilleure de tes amies LOL »

Il me reste donc un petit temps avant de sortir. Je prends mon sac à main et sors de la chambre et me dirige vers l’entrée du dortoir.
Je regarde mon téléphone portable et vois qu’il me reste encore 5 minutes à attendre. Le dos posé contre les murs qui entourent le bâtiment, je reste patiente et observe le ciel tout en tenant fermement mon sac. Je sais très bien qu’en me distrayant je risquais de le faire tomber. Au moins je suis rassurée comme cela.

J’entends une voix qui crie mon nom, ma tête bouge de gauche à droite jusqu’à trouver la source du bruit. Je vois mon amie et me rapproche d’elle. Sa tête dépassait de la vitre de la voiture.
Elle m’invite ensuite à monter en voiture et l’aventure peut donc commencer.

Durant tout le trajet nous nous sommes racontés pleins d’histoires, allant du plus banal au plus loufoque. Il faut avouer qu’elle ne reste jamais en place et bouge tout le temps.
Lorsqu’on est issu d’une famille riche, la vie est plus facilement supportable. Mais nous ne sommes pas là pour parler de cela, n’est-ce pas ?

Nous arrivons près du stade où se déroule le concert. Et là … je vois toutes les groupies. Ce ne sont pas uniquement celles de Veneris mais celles de Tokyo voir de plus loin.
Je bouche mes oreilles pour éviter d'entendre les cris. Je suis mon amie et nous nous faufilons vers une entrée VIP. Seuls les riches et célèbres personnes peuvent y entrer. Vous allez me dire que les célébrités sont VIP, vous avez raisons mais ici, il s’agit de celles qui ont gagné des concours. En général peu de personnes rentrent par ici.

Le couloir est magnifique, on pourrait croire que la décoration du stade a été spécialement modifiée pour le Boys Band. Tant d’efforts et d’argents gaspillés pour un concert. Je pense aux fans, non pas les groupies, les simples adorateurs de musiques. Ceux-là sont en nombre inférieur par rapport aux hystériques.
Certains n’ont même pas eu suffisamment d’argent pour se payer une place.
Leurs rêves ne se réaliseront peut-être même jamais.
Et à ce moment-là, je me sens coupable. Vous allez me demander pourquoi. Je vais vous répondre que je ne suis pas fan du groupe et que j’ai eu la chance de me faire inviter.

Mais enfin bref, il faut que je me sorte ça de la tête et que je profite de l’instant présent.
Plongée dans mes pensées je ne me suis pas rendue compte du garçon qui se trouve devant moi, et j’entends uniquement la voix de mon amie.

« SAICHIKO ATTENTION ! »

Je tourne la tête pour la regarder et heurte en même temps le dos d’un jeune homme aux cheveux bruns. J’ai honte et regarde le sol puis chuchote.

« E … Excusez-moi »

Oui je vouvoie, c’est par pure politesse, si ça se trouvait je venais de me cogner à une célébrité ou au fils d’un riche politicien. Qui sait ?


©Didi Farl pour Never-Utopia

Le garçon n'a pas l'air de m'en vouloir, cela me soulage. Imaginez que vous faites une simple erreur mais suffisante pour blesser un minimum quelqu'un, si cette personne ne vous pardonne pas je ne sais pas comment vous le prendriez. Mais personnellement je ne saurais pas quoi faire ... Je chercherais peut-être un moyen pour qu'elle accepte mes excuses ... Mais bref là n'est pas le sujet.

Je regarde le garçon mais celui-ci détourne le regard. Il a les joues rouges. Mais pourquoi ? J'ai fait quelque chose de déplacé ? Est-ce que quelque chose ne va pas dans mon apparence ?
Je regarde mes vêtements mais rien ne semble bizarre ou tombé. Mon regard se pose à nouveau sur ce jeune. Je l'observe comme je le fais à mon habitude, ses cheveux sont bruns. Un détail mais tout de même si je regarde son visage je pourrais peut-être me souvenir de lui dans le futur mais il ne me regarde pas. Je ne le vois donc que de profil.

Mina, mon amie m'a sorti de mon observation. Elle chuchote quelque chose dans mon oreille mais je ne sais pas ce qu'elle dit, je n'y prête simplement aucune attention. C'est probablement pour ça qu'elle soupire. Nous recommençons à avancer mais cette fois avec le garçon aux cheveux bruns près de nous.
Mina se dépêche et se rue sur lui. Je vous assure que parfois elle est vraiment envahissante, d'ailleurs ça commence. Elle agrippe le bras du jeune homme, mais je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée. Elle parle fort, on dirait qu'elle souhaite se faire remarquer. Je le plains déjà ...
Elle lui parle et moi je les regarde.

« Tu t'appelles comment ? Tu as quel âge ? Tu viens d'où ? Tu es dans quelle école ? Tu aimes aussi ce groupe ? Tu es riche ? Tu aimes quoi ? Tu détestes quoi ? C'est quoi ta série préférée ? Oh et ton plat favoris ? Et ton parfum de glace préféré ? Dis moi tout, tout sur toi, je suis curieuse. »

En temps normal je suis aussi curieuse, c'est vrai que j'aimerais connaître le nom du garçon. Mais cette manière de faire est vraiment insupportable ... Je ne peux que compatir avec lui. Après cette avalanche de question il doit se sentir mal à l'aise. On aurait plutôt dit un contrôle de police plutôt qu'une rencontre. Il ne manquait plus que le numéro de registre national du garçon ainsi que son carnet médical et Mina aurait pu créer un dossier plus rempli que ceux des autorités nationales.

Je m'approche de mon amie et la tire pour qu'elle lâche le jeune aux cheveux bruns. Une vraie sangsue cette fille parfois. Je suis complètement embarrassée par son comportement. Nous avançons jusqu’aux sièges qui nous sont attribués. Je m'installe en espérant que la place à ma gauche ne sera pas prise. Mais c'est un espoir idiot puisque toutes les places ont été vendues. A ma droite se trouve Mina bien sûr, elle est toute excitée par le concert et elle discute déjà avec la personne à sa droite. Je vous jure elle est plus que sociable et envahissante ...

Quelques minutes plus tard le garçon que j'avais heurté dans le couloir arrive et descend la rangée de sièges. Il arrive à ma hauteur puis me regarde et s'installe. Heureusement pour lui, Mina ne peut pas s'asseoir à côté de lui puisqu'il est sur le siège à côté des escaliers. Au moins s'il veut s'enfuir il aura facilement la possibilité.

Je le regarde et hésite à ouvrir la discussion. Peut-être qu'il ne veut pas parler ... Mais finalement je me lance, je n'ai rien à perdre.

« Je suis désolée pour le comportement de mon amie tout à l'heure. »

Je baisse la tête et regarde mes chaussures, j'ai honte en repensant à la scène qui s'est déroulée plus tôt.
Je n'attendais pas une réponse mais j'espérais quand même qu'il me parle.



©Didi Farl pour Never-Utopia